3. Les configurations flexibles




L’impératif d’efficacité oblige l’entreprise à remettre régulièrement en cause les structures existantes. Cette remise en cause se fait essentiellement sous la pression de l’environnement technologique et concurrentiel.

Ces mutations obligent également les entreprises à rendre leurs structures beaucoup plus flexibles. La flexibilité interne à l’entreprise s’est traduite par des réflexions en termes de réseau et de processus, ce qui a donné naissance à des structures organisées autour de projets en abandonnant les découpages fonctionnels classiques.

La nécessaire flexibilité oblige à revoir les relations avec les partenaires en déplaçant les frontières de l’entreprise.

I. Les structures flexibles

A. L’entreprise réseau

Si cette notion est apparue dans la littérature du management dans les années 1980, elle décrit des schémas organisationnels anciens. On peut monter, en effet, que dès le XIIe siècle, en particulier en Italie, il existait des réseaux d’entreprises juridiquement indépendantes mais toutes liées économiquement dans la réalisation d’une activité (en l’occurrence, le textile).

Par définition l’entreprise réseau est un ensemble d’entreprises ou d’entités interdépendantes organisé autour d’une entreprise pilote ayant chacune une compétence spécifique et qui vont entretenir, de façon unique ou récurrente, un processus globale.

Cette représentation est en rupture avec le schéma classique de l’entreprise intégrée, dans laquelle l’ensemble des étapes, depuis la conception du produit jusqu’à sa distribution, est assuré par la même entité.

Le réseau est constitué de multiples membres : les fournisseurs, les transporteurs, les distributeurs, les financeurs, mais aussi d’anciens salariés qui réalisent des missions spécifiques (outsourcing), ou encore les collectivités locales. Les clients sont également intégrés au réseau. Tous ces membres partagent leurs informations afin de réaliser un projet commun. Mais ils ne sont pas dépendants d’un seul partenaire. Ils conservent la liberté de réaliser d’autres transactions avec d’autres entreprises ou d’autres réseaux. L’exemple d’Airbus illustre cette construction en réseau.

B. L’organisation en processus

1. Le processus

Un processus est « un ensemble d’activités corrélées et interactive qui transforment des éléments d’entrée (input) en éléments de sortie (output) » (définition ISO 9000).

Exemple du processus commercial :

Etude des attentes des clientsRecherché et développement produitsMise en fabricationDistributionService après-vente

En recourant à une logique en terme de processus, l’entreprise regroupe des personnes qui intervenaient auparavant dans différents services cloisonnés (Marketing, production, R&D, commercial).

Une telle reconfiguration de la structure conduit à d’imposants changements internes :

  • sur la gestion des ressources humaines, les salaries intégrés dans les processus sont responsabilises dans la mesure où les postes sont interdépendants. Les rémunérations récompensent d’avantage les performances de l’entreprise ;
  • sur le système d’information, la logique en processus permet de répondre plus efficacement aux attentes des clients (informations plus accessibles, traitement plus rapide de l’information) ;
  • sur la culture, l’organisation en processus rend nécessaire une forte adaptation aux changements de l’ensemble des membres.

2. Le reengineering

La réflexion en termes de processus conduit le dirigeant à revoir l’ensemble de sont organisation. M. Hammer et J. Champy à travers la notion de reengineering, parlent même de « réinventer l’entreprise ».

Le reengineering – reconfiguration en français – consiste à remettre à plat l’ensemble du processus productif ou du système d’information afin de le rendre plus efficient. Il repose sur une organisation en processus centré sur la valeur client.

L’intérêt de la recomposition en processus est d’apporter un supplément de valeur à l’ensemble de l’entreprise. Il s’agit en effet de renoncer au cloisonnement fonctionnel pour organiser l’activité en processus qui répondent aux besoins des clients.

C. L’organisation en projet

Le projet est un processus unique et éphémère. C’est un ensemble d’actions à réaliser avec des ressources données et dans un délai précis conformément à des objectifs déterminé dans un cahier des charges.

Exemple : la réalisation par Bouygues Construction de  la ligne LGV-Est pour le compte du réseau ferré français (RFF) ou du musée Branly relève d’une démarche en projet.

1. Les conditions nécessaires à la mise en œuvre d’une structure par projet

  • L’opération doit avoir un caractère exceptionnel et ne pas pouvoir être traitée par les opérateurs existants.
  • Elle doit nécessiter la coopération des opérateurs fonctionnels (acteurs-métiers).
  • La réalisation en projet doit être un moyen de réduire les coûts et les risques.
  • La nécessité de respecter des délais stricts pour chaque étape du projet est indispensable.

C’est en particulier le cas des grands travaux faisant l’objet de conventionnement.

2. Les formes de la structure par projet

Le projet peut être intégré dans des structures classiques :

  • Le projet en structure matricielle : le ou les projets apparaissent dans la structure à travers un coordinateur de projet. Les acteurs du projet sont dépendants à la fois du responsable fonctionnel et du responsable de projet. Malgré la double tutelle des acteurs du projet , cette configuration présente l’avantage d’organiser le pilotage de plusieurs projets simultanément. Les coordinateurs du projet demeurent cependant des animateurs dépendant fortement des responsables fonctionnels.
  • Le projet peut être une composante à part entière de la structure : la structure par projet autonome. Les acteurs du projet sont intégrés directement à un projet et placés sous l’autorité d’un directeur de projet. Des services généraux commun sont mis en place pour assurer la cohérence et réduire les coûts. Les acteurs sont sous la seule autorité du directeur de projet. Lorsque le projet est fini, ils repartent sur un autre projet.

II. Les nouvelles frontières de l’entreprise

Dans les années 1990, l’étude de la chaîne de valeur de grandes entreprises a montré d’importantes pertes de richesse en raison :

  • d’une perception floue par le client de l’entreprise ;
  • d’une hausse incontrôlée des coûts ;
  • du gonflement de la technostructure ;
  • de l’augmentation du nombre de niveau dans la ligne hiérarchique

Les entreprises optent alors pour de nouvelles  stratégies afin de se recentrer sur le coeur de métier. Les exemples sont nombreux : Danone se recentre sur les produits liés à la santé en abandonnant les emballages et les biscuits ; le groupe Vivendi, excessivement diversifié, se restructure autour des métiers liés au divertissement.

Les entreprises mettent en œuvre de nombreuses techniques : sous-traitance simple, sous-traitance gigogne, création de co-entreprise (joint-ventures), partenariats. Certe ces montages ont un impact sur la structure, le plus souvent en l’allégeant, mais ils rendent beaucoup plus floues les frontières de l’entreprise.

La mise en œuvre de ces choix stratégiques se fait par deux voies :

  • la réduction de l’intégration vertical. On développe la sous-traitance et les partenariats avec les fournisseurs. L’entreprise externalise toutes ses activités non stratégiques (maintenance, paie, marketing, etc.). L’externalisation des services devient si forte que l’on parle parfois d’ « entreprise virtuelle » (ex. : eBay) ou d’ « entreprise modulaire » (ex. : Nike) ;
  • la réduction de la diversification. La mondialisation intensifie la concurrence. La préservation de la compétitivité oblige de grandes entreprises conglomérales à se « re-spécialiser » en cédant des activités sans lien avec l’activité stratégique et en rachetant des activités en lien avec le DAS.

La réussite de ces entreprises étendues repose sur des systèmes d’information performants qui accélèrent la circulation de l’information entre les salariés et renforcent les liens entre l’entreprise et ses partenaires. Cette intégration croissante des technologies de l’information et de la communication contribue à l’effacement des frontières de l’entreprise.