7. L’anticipation du risque




Il appartient à l’employeur de supprimer ou de réduire les risques professionnels afin d’assurer la sécurité et de protéger les santé physique et mentale des salariés. L’entreprise doit mettre en œuvre les principes de prévention et de précaution c’est l’anticipation du risque (Art L4121 et 5 du code du travail issu de la directive cadre européenne du 12 juin 1989). L’objectif est de renforcer la protection des salariés mais aussi de réduire les coûts économiques et sociaux liés aux maladies professionnelles.

I. Le principe de prévention

Il consiste à anticiper des mesures permettant d’éviter la réalisation du risque et des dommages qui lui sont liés. Le risque est connu.

1. Évolution de la prévention des risques professionnels

La prévention implique une double protection :

Protection de l’intégrité physique des salariés

  • Les risques physiques :
    • Exposition à des sources d’énergies (thermiques, sonores, lumineuses, etc), à des vibrations et des rayonnements
    • Manutention de charges
  • Les risques biologiques :
    • Exposition à des micro-organismes susceptible de provoquer des infections, allergies, intoxications, etc.
  • Les risques chimiques :
    • Exposition à des substances explosives, inflammables, toxiques, corrosives, irritantes, cancérogènes, etc.

Protection de la santé mentale des salariés

  • Stress au travail : déséquilibre entre les demandes faites au salarié et les ressources dont il dispose pour faire les travail (risque reconnu par l’accord national interprofessionnel (ANI le 8 octobre 2004)
  • Harcèlement moral : abus de pouvoir exercé à l’encontre d’un salarié qui porte atteinte à sa dignité et à ses droits (risque reconnu par Art L 1152-1 Code du travail
  • Violence et souffrance au travail
    • Comportements agressifs
    • Absence de reconnaissance au travail
    • Tensions entre les exigences et les moyens alloués (risque reconnu par l’accord cadre européen du 26 avril 2007)

2. Cadre juridique de la prévention

L’obligation de sécurité de l’employeur est une obligation de résultat*. Il doit mettre en œuvre toutes les mesures de préventions nécessaires afin que les salariés ne soient pas victime d’accident du travail ou de maladie professionnelle (art 6 directive du 12/06/1989 et art L4121.1 code du travail).

*  Obligation selon laquelle le débiteur (ici l’employeur) s’engage à procurer au créancier (ici le salarié) un résultat précis. Lorsque le résultat n’est pas atteint, l’obligation est inexécutée, le débiteur est présumé en faute. Il pourra peut être prouver qu’une faute étrangère a empêché l’exécution (la force majeur, le fait du créancier, du fait d’un tiers).

3. Méthodologie de la prévention / anticipation du risque

En vertu de son obligation de sécurité, de résultat, l’employeur à l’obligation d’élaborer et de tenir à jour un DUER (document unique d’évaluation des risques).
L’Art L4121-1 Code du travail énonce les principes généraux de la prévention :

  • Préparer la démarche de prévention (texte applicable, moyens financiers…)
  • Évaluer les risques et rédiger le document unique (bilan des dangers par unité de travail)
  • Proposer des actions de préventions (formations, informations, aménagement des postes de travail…)
  • Mettre en œuvre le plan d’action de prévention
  • Mettre à jour le document unique : réévaluer les risques

4. Un droit d’alerte et de retrait en cas de danger grave et imminent

Face à un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé, le salarié à le droit de quitter son poste en avertissent l’employeur du danger. L’exercice du droit de retrait ne peut entraîner ni sanctions ni perte de salaire. Le CHSCT est également tenu d’exercer le droit d’alerte.
L’inspection du travail peut être saisie et pourra imposer la cessation du risque et demander au juge l’application de sanction.

 

II. Le principe de précaution

Contrairement à la prévention qui s’intéresse aux risques avérés, la précaution, forme de prudence dans l’action, s’intéresse aux risques potentiels principalement dans le domaine de l’environnement et de la santé.

1. La Construction juridique

En 2004 : charte de l’environnement
En 2008 : Le conseil constitutionnel confirme la valeur constitutionnelle de la charte de l’environnement et donc du principe de précaution qui s’impose au pouvoir public et aux autorités administratives dans leur domaine de compétences respectif.

Le principe de précaution se place donc au sommet de la hiérarchie des normes

2. Destinataires du principe de précaution

  • Les autorités publiques : l’État dispose d’un pouvoir général qui s’impose aux autres autorités (préfet, maire, etc)
  • Les décideurs privés : ils doivent appliquer les mesures de précautions définit par l’État et se tenir informé des risques que les produits qu’ils commercialisent peuvent présenter.

3. Conditions d’application du principe de précaution

  • Un risque potentiel pour l’environnement ou la santé
  • L’incertitude scientifique (les causes du danger ne sont pas précisément connues)
  • La perspective d’un dommage grave et irréversible

4. La démarche de précaution dans l’anticipation du risque

Le principe de précaution est un principe d’action. La gestion de l’incertitude conduit à l’établissement de procédures

Évaluation des risques

L’évaluation des risques est confiée par l’État à des agences ayant le statut d’autorité administratives indépendantes (AAI) comme AFSSA (Agence Française de Sécurité Sanitaire des Aliments) ou AFSSET (Agence Française de Sécurité Sanitaire de l’environnement et du travail)

  • Elle caractérise le risque redouté
  • Repère les expositions au risque
  • Elle vérifie que le risque n’est pas purement hypothétique
  • La démarche repose sur des expertises scientifiques, fiables, solides et précises

La gestion des risques

Les mesures sont proportionnées aux risques :

  • Simple recherches scientifiques
  • Autorisation ou non de mises sur le marché
  • Réorganisation du système de production et de commercialisation (ex : étiquetage, traçabilité, etc)
  • Interdiction de mises sur le marché

Les mesures révisables et provisoires :

  • Révisables en fonction des progrès de la recherche scientifique
  • Provisoires : le décideur doit conduire une analyse globale d’opportunité et faire des choix en prenant en compte le ressenti de la société et les impératifs économiques



III. L’obligation de Sécurité

C’est le 3e principes qui permet l’anticipation du risque.

1. Le contenu de l’obligation de sécurité

Art L 221-1 Code de la Consommation (modifié par une ordonnance de 2008)

  • Transmettre des informations utiles
    • Mode d’emploi
    • Identité du producteur
    • Adresse du producteur
    • Référence du produit …
  • S’informer sur les risques des produits qu’ils commercialisent (sondages, tests, etc)
  • Mettre les consommateurs en garde de manière adéquate et efficace
  • S’interdire de mettre sur le marché des produits douteux
  • Informer immédiatement les autorités compétentes le cas échéant

2. Origine de l’obligation de sécurité

Selon la Cour de Cassation, l’employeur est tenu d’une obligation de sécurité de résultat notamment en ce qui concerne les maladies professionnelles contractées par le salarié du fait des produits fabriqués ou utilisés par l’entreprise, s’il n’exécute pas cette obligation, il commet une faute inexcusable*. Art L452-1 Code Sécurité Sociale : Lorsque l’accident est dû à la faute inexcusable de l’employeur, ou de ceux qu’il s’est substitués dans la direction, la victime ou ses ayant droit ont droit à une indemnisation complémentaire.

*faute inexcusable : c’est lorsque l’employeur a ou aurait dû avoir conscience du danger auquel été exposé le salarié et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver.

3. Le rôle des pouvoirs publics

Art L 221-3 Code de la Consommation (modifié en 2004) :

  • Ils fixent par produit les conditions de fabrication, d’importation, d’exportation, d’offre, de vente, de distribution à titre gratuit, de détention, de conditionnement, de circulation et d’utilisation des produits.
  • Ils déterminent les conditions d’hygiène et de salubrité que doivent observer les personnes qui participent au cycle d’exploitation du produit
  • Prévoient des obligations d’informations aux consommateurs
  • Et ils peuvent également ordonner le retrait ou la destruction d’un produit

La commission de sécurité des consommateurs est une AAI (autorité administrative indépendante), composé de magistrats, de professionnels, de consommateurs et d’experts. Sa mission est d’informer le public (communiqué de presse, campagne de sensibilisation, fiche de prévention, lettre périodique, rapport annuel, site internet) et de recenser les accidents et les risques de la vie courante.

 

Cette entrée a été publiée dans Droit. Sauvegarder le permalien.