Le développement durable cherche à concilier un objectif de croissance actuelle avec la satisfaction des besoins des générations futures. Pour cela, il est nécessaire de préserver un certain nombre de ressources.
I. Les objectifs du développement durable
A. Les conséquences de la croissance
La croissance n’a pas que des effets positifs. Le concept d’externalité a été développé en 1932 par Arthur C. Pigou, économiste anglais, pour corriger l’incapacité du marché à prendre en charge les problèmes liés à la dégradation de l’environnement et à la répartition des revenus. Pigou le définit comme « un effet de l’action d’un agent économique sur un autre qui s’exerce en dehors du marché » (The Economies ofWelfare, Macmillan, 1932).
La croissance s’accompagne de nombreuses externalités négatives qui concernent tous les pays, quel que soit leur niveau de développement.
1. L’épuisement des ressources naturelles
Toutes les ressources naturelles ne sont pas renouvelables (ex. : le pétrole, le charbon, le gaz naturel) ; la croissance épuise les ressources non renouvelables de la planète. Certaines ressources, bien que renouvelables, sont surexploitées: zones de pêche, terres arables (érosion des sols), forêts… et menacent de disparaître.
2. L’accentuation des inégalités entre les pays
Ces inégalités accentuent les risques de conflits entre pays pauvres et pays riches.
3. Des dégradations et des risques écologiques majeurs
La pollution des sols et de l’eau, la fragilisation des écosystèmes, l’émission de dioxyde de carbone constituent autant de facteurs de risques écologiques majeurs.
Le réchauffement climatique dû aux gaz à effet de serre a des répercussions sur l’agriculture (sécheresse), entraîne des pénuries d’eau pour la population, des inondations des zones côtières, etc. Parmi les risques écologiques, on peut citer les accidents technologiques majeurs (1984 : explosion d’une usine de pesticides à Bhopal, en Inde ; 1986 : explosion d’un réacteur nucléaire à Tchernobyl, en Ukraine ; 2011 : la centrale nucléaire de Fukushirna, au Japon), les marées noires (1978 : Amoco Cadix ; 1989 : Exxon Valdez ; 2002 : Erika Prestige ; 2008 : pollution de l’estuaire de la Loire par la raffinerie Total de Donges ; 2010 : fuite sur un forage de pétrole dans le golfe du Mexique).
B. Les fondements du développement durable
Le développement durable est, selon la définition du rapport Brundtland, Notre avenir à tous (1987), « un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs ». Le développement durable est donc un compromis entre trois contradictions fondamentales :
- les intérêts des générations actuelles face à ceux des générations futures ;
- les intérêts des pays industrialisés face à ceux des pays en développement ;
- les besoins des êtres humains face à la préservation des écosystèmes.
1. Les origines du développement durable
- En 1968, un groupe de personnalités visionnaires de différents pays crée le Club de Rome. Il souhaite que la recherche s’empare du problème de l’évolution du monde pris dans sa globalité pour tenter de cerner les limites de la croissance.
- En 1971, le Club de Rome publie un rapport (Halte à la croissance] qui prône la croissance zéro. Le développement économique y est présenté comme incompatible avec la protection de la planète à long terme et entraînera, au cours du xxie siècle, une diminution brutale des populations due à la pollution, à l’appauvrissement des sois cultivables et à la raréfaction des ressources énergétiques.
- La conférence des Nations unies sur l’Environnement humain, qui se tient à Stockholm en 1972, ajoute, pour la première fois, des questions d’ordre écologique aux préoccupations internationales. Elle crée le Programme des Nations unies pour l’Environnement (PNUE) et le Programme des Nations unies pour le Développement (PNUD).
- En 1984, Mme Brundtland, alors Premier ministre de la Norvège, est chargée de créer et de présider la Commission mondiale de l’Environnement et du Développement. Son rapport, Notre avenir à tous, qui paraît en 1987, définit le concept de développement durable.
2. Les principes du développement durable
- La solidarité avec les générations futures
Le développement durable doit prendre en compte les besoins des générations à venir. Il s’agit de promouvoir un développement équilibré qui économise les ressources renouvelables (ex. : la forêt, la pêche) et prévoit le remplacement des ressources non renouvelables (ex. : l’énergie fossile).
- La solidarité avec les populations de la planète
Le développement doit profiter à toutes les populations. Les pays pauvres ont besoin de la croissance de leur économie pour répondre aux besoins de leurs populations et pour éviter la surexploitation de certaines ressources.
- Le principe de précaution
Ce principe s’applique lorsque les connaissances scientifiques sont incertaines quant à leurs conséquences sur les populations ou l’environnement. En cas de doute sur l’impact environnemental ou sanitaire d’une action ou d’un produit, il est préférable d’y renoncer sur le court terme plutôt que de risquer des dommages irréversibles pour l’homme ou l’environnement.
- La participation de tous les acteurs de la société civile
L’État n’est pas le seul responsable du développement durable. La réalisation des objectifs du développement durable ne peut aboutir que si l’ensemble des acteurs de la société civile agit en commun : les entreprises privées, les entreprises publiques, les associations, les ONG, les syndicats et les citoyens.
II. Les indicateurs du développement durable
La notion de PIB, élaborée en 1934 par le prix Nobel d’économie Simon Kuznets pour mesurer le résultat de la croissance des pays développés, doit être complétée par de nouveaux indicateurs du développement durable.
A. L’empreinte écologique
Développée au début des années 1990 par William Rees et Mathis Wackernagel (professeurs à l’université de Vancouver), l’empreinte écologique mesure la surface productive nécessaire à une population pour répondre à sa consommation de ressources (nourriture, chauffage, habitat…) et à ses besoins d’absorption de déchets. Elle reflète le degré d’utilisation de la nature par l’homme à des fins de production et de consommation matérielles.
Selon le WWF (Wild World Fund for nature], l’empreinte écologique globale de l’humanité a pratiquement doublé au cours des 35 dernières années et dépasse de 20 % les capacités biologiques de la Terre. L’empreinte par personne des pays à hauts revenus est en moyenne six fois plus élevée que celle des pays à faibles revenus.
B. Le PIB vert
Le PIB vert est un nouvel indice lancé par le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) à l’occasion de la conférence sur le développement durable Rio+20. Cet indice appelé aussi indice de richesse globale («inclusive wealth index», en anglais) part de la mesure du PIB classique et prend en compte l’évolution du capital humain et l’évolution du capital
naturel (ressources renouvelables et non renouvelables).
Ce nouvel indice propose de mesurer sur le long terme des indicateurs sociaux et sociétaux (capital humain, santé, bien-être, etc.) et environnementaux pour tenir compte de « toutes les composantes de la richesse dans un pays » et de leur évolution dans le temps.
La principale limite du PIB vert repose sur la difficulté à estimer sa valeur.
C. Les indicateurs de bien-être et de progrès
1. Le bonheur intérieur brut (BIB)
L’OCDE a lancé en 2011 l’indice du Bonheur Intérieur Brut (BIB) pour mesurer la qualité de vie dans ses pays membres. Cet indice est basé sur onze critères que l’on peut regrouper en deux grandes catégories : les conditions de vie matérielle (emploi, logement, revenu) et la qualité de vie (liens sociaux, enseignement, environnement, équilibre entre travail-vie privée, gouvernance, santé, satisfaction et sécurité).
2. L’indice de progrès véritable (IPV)
Cet indice ajoute à la consommation des ménages diverses contributions à la « vraie » richesse et au bien-être (ex. : une activité bénévole, le travail domestique). Puis il soustrait la valeur estimée des richesses perdues, notamment naturelles (destruction de la couche d’ozone, destruction de ressources non renouvelables…), mais aussi sociales (coût social du chômage, accidents de la route, progression des inégalités, perte de temps libre supportée par ceux qui travaillent trop).
La limite de cet indice est la difficulté à évaluer des réalités qualitatives telles que le coût social du chômage ou l’épuisement des ressources naturelles. Il existe de nombreuses variantes de ces deux indicateurs. Leur intérêt réside essentiellement dans une comparaison avec le PIB. Les principales difficultés portent sur leur calcul, en particulier le choix des unités de mesure et leur monétarisation.
III. Les politiques du développement durable
A. Les actions au niveau international
Les actions au niveau international se décident lors de conférences internationales, essentiellement sous l’égide des Nations unies.
1. Le protocole de Kyoto (2005-2012)
Le protocole de Kyoto, adopté en 1997 lors de la troisième conférence-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, propose un calendrier de réduction des émissions de gaz à effet de serre (CES), considérés comme la cause principale du réchauffement climatique. Il impose à 38 pays industrialisés de réduire leurs rejets de gaz à effet de serre dans l’atmosphère de 5,2 % d’ici 2012 par rapport aux émissions de 1990. Pour arriver à ce résultat global, les quotas diffèrent selon les pays.
Des permis négociables ont été institués pour permettre aux pays qui polluent plus d’acquérir des droits à polluer auprès de pays qui polluent moins.
Février 2005 : entrée en vigueur du protocole de Kyoto (qui expire en 2012), après sa ratification par I 161 pays (les États-Unis, à l’origine de 25 % des émissions mondiales, ont annoncé en mars 2001 leur refus de le ratifier). Les pays en développement qui l’ont ratifié auront de simples obligations d’inventaire d’émissions polluantes.
Les accords de Durban, fin 2011, prolongent le protocole de Kyoto jusqu’en 2020. Ils prévoient que tous les pays, quel que soit leur niveau de développement, participeront à l’effort mondial de lutte contre le changement climatique et prendront des engagements, à partir de 2015, de réduction d’émissions dans le cadre d’un accord mondial.
2. Rio+20
« Rio+20 » est le nom abrégé de la conférence des Nations unies sur le développement durable qui s’est tenue à Rio de Janeiro, en juin 2012.
La déclaration finale intitulée « L’avenir que nous voulons » formule de grands principes sur :
- l’économie verte et équitable ;
- la dimension sociale du développement durable ;
- le renforcement de la gouvernance environnementale internationale.
Cette déclaration lance des Objectifs de développement durable (ODD) sans les accompagner d’une définition. Elle ne règle pas les problèmes de financement.
3. Les autres actions
La Convention sur la diversité biologique, adoptée lors du sommet de Rio et entrée en vigueur en décembre 1993, a pour objet la réduction du rythme d’appauvrissement de la diversité biologique à l’échelle planétaire.
Le protocole de Carthagène sur la prévention des risques biotechnologiques, signé en janvier 2000, constitue le seul instrument international contraignant qui traite explicitement des organismes
génétiquement modifiés et de sécurité environnementale.
En 2002, au sommet de Johannesburg, plus de cent chefs d’État ratifient un traité prenant position sur la conservation des ressources naturelles et de la biodiversité. La Journée mondiale de l’eau du 22 mars 2007 a souligné que l’eau est un enjeu vital : 2,4 milliards d’individus ne disposent d’aucun assainissement (toilettes, égouts) et 1,1 milliard de personnes n’ont même pas accès à l’eau potable.
B. Les actions au niveau de l’Union européenne
L’Union européenne établit une stratégie à long terme en faveur du développement durable, qui s’articule autour de quatre thèmes : lutter contre le changement climatique, assurer des transports
écologiquement viables, limiter les risques pour la santé publique et gérer les ressources de manière responsable.
Pour atteindre les objectifs de réduction d’émission de gaz à effet de serre, l’Union européenne a choisi les bourses d’échange de droits à polluer (permis négociables) et la taxe carbone (écotaxe sur le contenu en carbone du carburant utilisé).
Actuellement, 80% de la réglementation nationale dans le domaine de la préservation de l’environnement est d’origine communautaire : la loi sur la responsabilité environnementale, le principe
de réparation du dommage écologique causé aux biens inappropriables, indépendamment de toute atteinte à des biens ou des personnes, le principe du pollueur-payeur (directive européenne de 2004).
C. Les actions à l’initiative du marché
Le développement durable représente un double enjeu pour les entreprises : d’une part, un enjeu économique, leur survie à long terme et, d’autre part, leur contribution aux enjeux de société.
Le développement durable devient un véritable outil de différenciation, au même titre que la qualité et les services. L’évolution de la réglementation, destinée à mieux préserver les ressources naturelles, incite aussi les entreprises à aller dans le sens du développement durable. Enfin, la pression issue de la concurrence qui a déjà sauté le pas est un autre élément auquel les entreprises sont sensibles.
Les entreprises créent des emplois en mettant sur le marché de nouveaux produits (produits biodégradables, produits fabriqués à partir de matières premières renouvelables ou recyclées, etc.) et
en s’orientant vers des services liés au développement durable (traitement de l’eau, traitement et valorisation des déchets, etc.).
L’industrie verte emploie près de 500 000 salariés et représente 2 % du PIB à travers les activités liées aux économies d’énergie, à la réduction de consommation de matières premières et de ressources, à la diminution des gaz à effet de serre. Ce secteur très dynamique apporte un excédent commercial de plus d’un milliard d’euros.